Poing, à la ligne, tirez. La doctrine Obama


« Un jour, je me promenais dans un village reculé d’Indonésie, et j’y ai trouvé une bibliothèque toute neuve. J’y suis entré et j’ai eu la surprise de voir qu’elle était remplie de livres en chinois. Payer une bibliothèque, c’est ce qu’auraient fait les Américains, dans les années 50 ». C’est avec cette image que David Sanger, chef du bureau de Washington au New York Times, a illustré l’évolution des relations internationales des Etats-Unis. Invité le 16 avril au Yale Jackson Institute for Global Affairs à New Haven , le journaliste a donné sa vision d’une question largement débatue: existe-t-il une doctrine Obama?

Sa réponse, globalement, tient au fait que la pratique des affaires étrangères de Barack Obama constitue l’une des surprises de sa présidence. Et apparemment pas seulement pour les Européens. Car si Barack Obama était perçu comme moins béliqueux que George W. Bush, la réalité s’est révélée plus nuancée.

Deux remarques ont précédé le fond de l’intervention de David Sanger. La première, c’est que l’intéressé, est moins bavard que son prédecesseur. Les briefings en matière internationale sont moins fréquents. « On peut déterminer un axe du mal, ou décréter que la guerre est finie, mais le dire s’est avéré risqué », explique en substance M. Sanger. En clair, expliquer qu’on a une doctrine, c’est s’exposer à devoir justifier ses décisions en fonction de celle-ci. Or, de fait, les valeurs défendues par l’Amérique et ses intérêts se contredisent fréquemment: « Bush, dès qu’il faisait quelque chose, on l’entendait en parler trois fois par semaine. Obama, il explique une fois quelque chose et on n’en entend plus parler pendant six mois.  « Les Américains ont poussé Hosni Moubarack sous un bus en Egypte », a immagé le journaliste, « et Bahrain, ils ont poliment invité le pouvoir à assouplir ses positions. La différence? La présence dans l’Emirat des forces navales US.

Agressivité

Sur le fond, David Sanger estime que la présidence Obama marque une redéfinition de l’utilisation de la force, de la persuasion et de la diplomatie. Le but: éviter de se retrouver dans des guerres longues et couteuses. Mais ça ne signifie pas forcément un moindre recours à la force. Les actions « coup de poing », violentes et unilatérales se sont en effet succédées, de l’opération contre Ben Laden, à l’intérieur des frontières d’un pays souverain, aux attaques par drônes qui ciblent les Talibans (entre autres).

Multilatéralisme

D’autre part, dans les interventions qui ne visent pas spécifiquement à défendre des intérêts américains directs et immédiats, la coopération avec l’Europe notamment, différencie Obama des Bush, mais même de Bill Clinton (« songez à la manière dont il a pris le leadership dans les Balkans, par exemple »).

Pour David Sanger, « l’agressivité de Barack Obama constitue une surprise pour ses ennemis comme pour ses alliés ». Pour le journaliste, cette situation a des « bons cotés »: celui de « ne pas se lancer dans des occupations de longue durée, coûteuses et qui stimulent le ressentiment des populations concernées ». Mais pour lui, elle représente aussi un risque de perte de contrôle. « On se retire peut-être un peu trop ».

Et l’élection?

Enfin, Mr Sanger a terminé par un avertissement classique: « mes prochaines conclusions, s’il est réélu, risquent d’être différentes. Un président, dans son premier mandat, fait ce qu’il faut pour voir son mandat reconduit. Il a aussi eu un mot pour l’adversaire probable du Président. « Mitt Romney base son attaque en matière étrangère sur la faiblesse de Barack Obama. Ça risque de ne pas marcher. Et puis, Romney a déclaré, après l’affaire du micro oublié, que la Russie était notre plus grand énemi. Il a raté une étape importante de l’histoire, on dirait! ».

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